Devis Grebu

J’apprécie comme il se doit l’ordinateur, cette extraordinaire invention électronique, mais j’essaie, sans trop de succès, de convaincre mes confrères de la supériorité de ma position - certes circonspecte, à ce sujet. Car je suis un grand admirateur de l’intelligence humaine.Je crois même qu’elle est un facteur décisif pour préserver intact le bien le plus précieux de l’être humain, la dignité. Si l’intelligence innée est ensemencée et cultivée intellectuellement à travers des expériences vécues par nous-mêmes et ceux qui guident nos premiers pas vers des lectures de qualité et des goûts audio-visuels raffinés, grâce à cette assimilation équilibrée et en constante évolution, nous sommes munis d’une carapace protectrice. Et si de surcroît on est élevé dans un esprit de tolérance généreuse, notre talent peut jaillir à travers les fissures de cette carapace, dans toutes les directions. L’aboutissement est „le style propre“, la personnalité. Si nous pouvons nous permettre la possession d’un ordinateur, et l’exploiter à outrance en en faisant notre esclave (et non vice-versa comme cela arrive de nos jours, surtout chez les jeunes), alors on peut considérer qu’on est vraiment privilégié. Car, tout en gardant cette réticence quasi allergique, surtout lorsqu’il s’agit de pénétrer les secrets des fonctionnements sophistiqués de ce superbe „monstre“, je l’utilise en permanence et je bénéficie de ses atouts : économie spectaculaire de temps, documentation sans limites, métamorphoses d’images esthétiquement inaccessibles par d’autres moyens, services postaux (e-mail) fulgurants, etc. Evidemment en faisant appel aux intermédiaires bénévoles ou rémunérés, qui savent l’apprivoiser. Donc, sans ressentir la moindre aversion à l’égard de l’ordinateur et encore moins de l’Internet, je suis totalement hostile à l’emploi de cet appareil comme substitut du cerveau qui, - je le constate horrifié, spécialement chez la jeune génération - s’atrophie au fur et à mesure que les ordinateurs se perfectionnent. De plus, je prétends que, autant l’ordinateur que le cellulaire sont devenus deux gadgets établissant les degrés du „standing“ social, étant achetés pour épater les autres et pire que ça, utilisés pour toutes sortes de frivolités pour lesquelles ils n’ont pas été conçus. Quant à changer dramatiquement d’attitude envers ce „phénomène“ de société, seul l’état de mort clinique de mon propre cerveau pourrait m’y amener.

Au sujet des ordinateurs
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Ainsi, une bonne part de mes oeuvres est le résultat de ce regard critique sur le monde qui m'entoure, ce qui donne à mes travaux un caractère pessimiste ou pamphlétaire. Or, je commence à être las de me placer toujours de ce point de vue de citoyen, même si par ailleurs je traite le sujet de façon philosophique et artistique. J'aimerais parfois perdre le contact avec ces réalités-là, et exécuter des oeuvres plus absolues, comme une molécule isolée, une essence, un noyau.(D.G.)